samedi 4 janvier 2014

5.1.14

Salut tout le monde !

Eh bah, quel mois de decembre.

Il y a eu le passage tant redouté de mon anniversaire. Mais étant donné que je ne peux jouir de mes droits d’adultes que sur certains plans – financier notamment, pour ce qui est des droits politiques, de l’alcool, du tabac et compagnie, c’est niette. Du coup les 18 ans je les percute pas encore vraiment. Et ça j’ai toujours du mal à l’accepter, d’autant plus que je suis entourée de gamins toute la journée au lycée.
En parlant de ça, j’ai capté un truc. En en ayant discuté avec mon prof de français, je suis vraiment avec des gens de 3e dans leur tête. Ok, au lycée on peut dormir, c’est cool et tout, mais rien que l’uniforme : tout le monde habillé pareil, rangé pareil, avec des numéros comme des matricules. On ne demande jamais l’avis des élèves, on ne les interroge jamais à l’oral, on les laisse dormir parfois, on les laisse quitter la classe pour aller aux toilettes en plein milieu du cours. Le prof arrive, fais son cours, la cloche sonne et il repart aussi vite qu’il est arrivé.
En français on a regardé le film “Entre Les Murs” (que je conseille vivement), pour montrer ce que c’est que l’école en France en gros. Déjà, ils étaient plutôt étonné de voir les élèves sans classe qui leur est propre, mais c’est rien à côté des scènes où ils reconstituent en gros un cours. Les voir voir des élèves s’exprimer, contester les paroles du prof, faire du bruit, répondre … c’est le grand fossé qui sépare l’école française de l’école taiwannaise.
Mais faut pas se berner. Ici, avec l’uniforme, ils sont “tous les mêmes”, je veux dire, tous habillés pareil qu’on soit grand ou petit, gros ou maigre. Ici, on ne leur demande jamais leur avis, on ne les interroge que par écrit quand ils ont des interros. C’est un peu des moutons d’une certaine manière, mais on ne leur donne pas l’occasion de s’exprimer non plus. De très, très rares fois, les plus “turbulents” (quand ils ne dorment pas) vont au tableau, en maths ou en français –d’ailleurs la classe de français est la seule où il y a un dialogue digne de ce nom entre le prof et les élèves à chaque classe-. Tandis qu’en France c’est contestation, avis sur avis, ok parfois c’est ultra lourd –pour l’avoir vécu hein !- mais il y a un dialogue. Pour résumer, je trouve qu’en fin de compte en France les élèves ouvrent trop leur bouche et ici pas assez. Mais bon, c’est mon ressenti, peut-être que vous le percevriez différamment.
Mais c’est pas pour autant que je leur parle pas, oh non. Je sors déjà en ville avec certaines camarades que je peux considérer comme “amies” déjà, et plus particulièrement à une, peut être parce qu’elle parle couramment anglais. Mais je remarque qu’au plus je bosse et pratique la langue chinoise, au plus ils viennent me parler … ce qui me motive encore plus pour apprendre ! Si seulement ca avait été pareil l’année dernière pour la SES …


Bien sûr que j’ai pleuré, si c’est ce que vous voulez savoir sans le demander dans vos mails et cartes. Et encore plus de fois j’ai retenu mes larmes. Ma famille me manque terriblement en ces fêtes de fin d’année, c’est indéniable. J’espère que le nouvel an chinois me permettra d’effacer tout ça. Enfin je veux dire, ici à Taiwan, Noël ne se fête pas et seul mon lycée a eu un jour férié le 25 parce qu’ils sont cathos (oui, j’ai eu “cours” le 24 ! mais ca c’est une autre histoire). Du coup, niveau climat et absence de décorations ou autres qui rendent l’arrivée de Noel imminente (déco des magasins, des maisons, jouets partout partout, rush des adultes pour acheter les cadeaux, etc.) bah j’ai pas vraiment senti que c’était Noel. Et j’ai cours le 31 décembre également, seul le 1e est férié ! Mais bon j’ai de la chance, le 2 et le 3 y’a des examens du coup j’ai cours que Lundi 30 et Mardi 31. Je plains par contre mes pauvres camarades de classe …
Mais le nouvel an chinois est une autre pair de manches. Ma famille m’en parle déjà; c’est THE évènement. Déjà on a genre un mois de vacances, et en plus on retourne dans nos premières familles d’acceuil une dizaine de jours. Il y a la blinde de festivités et tout et tout. Alors j’espère que ce nouvel an chinois me permettra d’oublier un peu le monde et les fêtes occidentales pour encore mieux me plonger dans la culture asiatique, et peut-être même “couper le cordon” histoire d’oublier cette fin de mois douloureuse. Et de, par ces deux nouvels ans, repartir sur des méga bonnes bases, ancrée du mieux que je le peux dans cette culture, parce que oui, mine de rien, fin janvier c’est aussi la “frontière”, le milieu de mon échange, le grand tournant, et mes choix auront de sacrés impacts sur l’avenir de mon échange et encore plus sur les souvenir que je vais en avoir.
Niveau pratique de la langue, j’ai franchi les 350 caractères que je peux écrire, reconnaître dans la rue, mais pas toujours écrire de mon propre chef. Beaucoup de sonorités sont identiques et les caractères ne représentent pas ce qu’on entend mais ce qu’on voit. Du coup pour un son comme “shi” on peut avoir jusque 50 caractères différents, représentant des verbes, noms, adjectifs et tout le barnum. Sans parler de la grammaire qui est carrément différente. Mais c’est pas impossible de tout apprendre, tout pratiquer et tout perfectionner, oh non.

Le 21, j’ai dit adieu à un ami brésilien, qui lui est arrivé à Taiwan en janvier 2013 –échange d’été donc, comme c’est le cas en Australie où tout est inversé. Ce gars a été mon grand frère pendant 4 mois. C’est lui qui nous a tout montré à Hualien, qui nous a donné tout plein de conseils, qui nous a guidés quand on étaient paumés d’une manière ou d’une autre. Mais il a été bien plus que ça; il m’a aussi donné un apperçu de ce que je pouvais être en fin de séjour, du niveau que je pouvais avoir en chinois, des choses que je pouvais encore découvrir sur le monde ou sur moi-même … bref, ça m’a donné un apperçu de ce que je pouvais apprendre et accomplir et plus d’une fois cet apperçu m’a découragé de baisser les bras. Bon j’ai pas pleuré pour son départ j’ai attendu de rentrer à la maison et de m’enfermer dans ma chambre pour le faire, car avoir un grand frère et le quitter en cette période critique des fêtes de fin d’année c’est genre pas mais pas du tout top pour le moral. Mais bon. Je n’ai que des souvenirs heureux et ce pote brésilien, ce Big Brother Bear comme je l’appelais (référence au film Frère des Ours, parce qu’il m’appelais Rebelle et il fallait que je lui trouve un surnom Disney qui lui correspondait), fait partie intégrante de mon voyage et chaque fois que je penserais au début de cette aventure je penserais à lui. Et puis, c’est marrant dans le fond de se dire qu’on a eu un grand frère brésilien à Taiwan – ca fait genre société cosmopolite et tout. Mais au final c’est bien au delà de ça.

Sinon sinon, le 31 a été ni plus ni moins pourri. En gros on a eu un meeting avec mon club qui s’est fini à 21h. Moi et le brésilien ayons pu rejoindre d’autres amis inbounds, sauf que comme ma mère est la secrétaire du club, elle était “très très fatiguée et occupée par son travail”, comme d’habitude à chaque fois que je sors. Alors que TOUS les autres inbounds avaient la permission de minuit et demi, bah y’a Soizic qui est rentrée chez elle à 10h. Ouais, 10h. Mon père d’acceuil et mon frère, j’avais aucune idée d’où ils sont allés pour fêter la nouvelle année, mais ils étaient en dehors de la maison c’est sûr. Du coup je suis rentrée avec les nerfs à fleur de peau, sachant qu’à chaque fois ma mère d’acceuil me sert toujours les mêmes excuses –du moins c’est comme ça que je le ressent. Je sais pas ce qu’elle a fait après et je m’en moque, j’ai foncé dans ma chambre et ai répondu aux mails que certains d’entre vous m’ont envoyé. Puis je me suis mis Kill Bill et Django Unchained sur mon ordi, avec mes écouteurs. J’ai percuté que la nouvelle année était arrivée à la fin de Django, soit à peu près à une heure du matin. Bien qu’à Taiwan ils aient le nouvel an chinois, il y avait des feux d’artifice et plein de monde dans le centre de la ville. Et rester comme ça, chez moi, alors que tous les autres étaient ensemble pour marquer l’évènement, parce que ma mère d’acceuil est “trop fatiguée” (même excuse depuis quatre mois), ouais comprenez que je l’avais un peu mal. Mais bon, le lendemain matin, à 9h pétantes, je descendais avec ma valise et toute mes affaires, parce que …
CHANGEMENT DE FAMILLE !!!

C’est à 10h que je suis arrivée dans ma nouvelle famille, qui elle vit au sud de Hualien par rapport au centre ville. Déjà, ma nouvelle maman travaille pas, ce qui me laisse pleiiiiiiiiin de possibilités : plus obligée de faire la cuisine, de plier TOUTES les fringues de la famille, de faire TOUTE la vaisselle, de pas faire de bruit parce que à 6h mon ancienne mère d’acceuil dormait ou prenait un temps calme. Mais rassurez vous, je sais que je suis pas à l’hôtel hein. J’aide aussi, je fais la vaisselle, et tous des trucs du genre, mais c’est différent. Ma nouvelle mère d’acceuil m’a absolument rien demandé. Contrairement à la première, elle ne prend pas cet air archi exténué pour me faire bien sentir coupable si je l’aide pas. Elle a carrément été surprise de me voir mettre la table – en lui demandant poliment si je pouvais bien sûr, oubliez pas que c’était le premier jour hein.
Sinon, après avoir réinstallé mes affaires dans ma nouvelle chambre, on est allés manger un hot pot – en gros c’est un plat de bouillon non gras constamment chauffé, et on y cuit sois-même ce que l’on veut, viande, légumes, tofu, etc … Il y en a plein à Hualien, et j’avais jamais testé avant. Dans tout Taiwan c’est ultra connu, et en quatre mois passés dans ma première famille, il a fallu que je change pour y mettre les pieds la première fois, au bout de quatre mois. Sans commentaires. J’ai aussi rencontré Amanda, une américaine qui il y a sept ans était venu dans ma nouvelle famille –alors que leur fille était en échange au Danemark. Elle a fini l’université et est revenue à Taiwan enseigner l’anglais. Elle est super cool, bien qu’un peu spéciale parfois, mais super cool avant tout.
Ensuite, on est allés au supermarché avec Amanda pour acheter des fruits. Mes nouveaux parents d’acceuil parlent beaucoup moins anglais que Maggie, ce qui me laisse carrément plus pratiquer le chinois – avant il fallait que je demande à Maggie de parler chinois et non anglais par moments … et mon père d’acceuil est présent, bien qu’il travaille du lundi au vendredi – avant je le voyait qu’une vingtaine de minutes sur tout le weekend et il ne me parlait pratiquement jamais. En suite, on est rentrés à la maison, et on a parlé de tout ce qui est règles, emploi du temps, bus –ouais maintenant je prend le bus une demie heure pour aller au lycée !- et tout un tas d’autres trucs. Le jeudi (02/01) et le vendredi je suis allée en cours, normal quoi. Et le vendredi soir on est allés dans le centre ville prendre un café et une part de gâteau – sauf moi, pas de café sinon je dors pas et pas de gâteau car la nourriture taiwannaise a assez fait de dégâts comme ça sur mon Monsieur GrasDuBide- le tout en parlant, en rigolant.
Hier –samedi donc, lever à 6h30 et départ à 7h20 pour un truc que j’ai pas fait depuis mi-octobre au moins : VOYAGER ! On a prit la voiture et Amanda au passage, direction le sud et Taidong. La route était longue mais cool parce qu’on discutaient tous ensemble la plupart du temps. On est passés par le Tropic du Cancer (oui, si si, la ligne au nord de l’équateur sur toutes les cartes du monde là. D’ailleurs ca fait bizarre, il y avait une sorte de gros marqueur en monument pour bien placer l’endroit, et se dire qu’on est enfin sur une ligne qu’on étudie depuis la primaire, ca fait bizarre. Je me souviens m’être imaginée sur la carte du monde, avec un A comme sur google maps pointé sur le croisement entre Taiwan East Side et la ligne imaginaire, ca fait tout drôle). Puis, on est allés vers Taidong après s’être arrêtés à plusieurs endroits superbes et on est allés dans un resto super connu, un autre Hot Pot avec un méga buffet de viande et d’innombrables légumes, tout bio et tous de la campagne juste à côté. Il y avait la campagne qui s’étendait à perte de vue (le resto est en hauteur sur les mini montagnes), et bien que le temps fut nuageux tendance mini brouillard à l’horizon, c’est tout de même magnifique. Par la suite, après plusieurs arrêts – dont un sur un terrain qui sert de départ de parapente et mongolfières en été, d’où l’on peut voire touuuuute la plaine et ses cultures – on est allés dans un village aborigène se balader et voire un spectacle de danses. J’aime beaucoup cette facette de la culture Taiwanaise, qui est ultra locale. Persécutés par les Japonais, les aborigènes se sont tous beaucoup déplacés dans les villes pour travailler, et se sont divisés et certains n’ont pas transmis les chants et les danses et toutes les autres facettes de leur culture à leurs enfants. Ils se sont regroupés de plus en plus depuis les années 60-70 et depuis s’efforcent de partager et transmettre leur culture à leurs enfants et aussi à qui veut bien découvrir ce qu’ils sont – et croyez moi y’a du monde. Après une pause café, on a reprit la voiture direction une autre ville, où mon père d’acceuil – qui vient de la campagne- s’arrête chaque fois qu’il y passe depuis trente ans pour manger un bol des nouilles les plus connues de la ville parce que quand il était petit c’était son rêve d’en manger le plus possible tellement il adore, m’a-t’il dit. Comme quoi. Mais bon comme il était 4h de l’aprèm et que l’orgie de légumes que je me suis prise au déjeuner m’a plus que calée, moi comme ma mère d’acceuil et Amanda n’y avont prit qu’une cuillère – et punaise ouais elles sont bonnes ces nouilles, bien que super grasses. Et après, on a repris la voiture, direction … les Hot Springs – ou thermes, si vous préférez. On est allés dans un établissement thermal qui a plus de cent ans dans les montagnes pour prendre un bain dans de l’eau à 37 degrés ! L’hiver ici est particulièrement cruel, parce que humidité+vent froid des montagnes et de la mer = le nord pas de calais n’est plus si loin que ça. Alors des bains d’eau chaude d’extérieur comme ça, avec la fumée du contact entre l’eau chaude et l’air froid, c’est parfait ! Je suis restée dix minutes dans le bain à 42 degrés mais suis sortie un peu trop vite parce que ma tête tournait, et passer du chaud au froid en sortant du bain qui plus est rapidement m’a mise un peu dans les vappes, j’avais les oreilles qui bourdonnaient et les muscles tous engourdis sans parler de la tête qui tourne pendant un bon quart d’heure, mais après avoir respiré et m’être assise un bon coup ça allait mieux. On est enfin repartis pour Hualien, on a déposé Amanda chez elle et on est rentrés vers 8h. J’étais complètement claquée du coup à 8h30 je dormais, mais j’ai bien passé cinq minutes pleine de gratitude à remercier et remercier encore ma famille, d’une sincérité pure et profonde. Pourquoi ? Parce que pendant qu’on roulaient pour rentrer à Hualien, j’ai capté que en quatre jours que j’ai passés dans ma nouvelle famille, j’ai fait autant de choses et vu autant d’endroits que pendant les deux-trois derniers mois dans ma première famille.
Ca a l’air tout con, mais c’est comme ça. Je les adore déjà, et le fait d’avoir refait ma valise – qui a doublé de volume et tout m’a refait vivre mon premier jour. J’ai pu percuter combien j’ai appris, combien j’ai découvert, et surtout combien il me reste à vivre ici. Et de ce point de vu j’ai intérêt à me grouiller !
Ca fait maintenant un peu plus de quatre mois – presque quatre mois et demi que je vis ici. Ou d’une autre manière, il me reste 6 mois et 9 jours à l’heure où je vous écrit pour découvrir, découvrir, voir, voir, apprendre, apprendre, me gaver intellectuellement de tout ce que je peux engloutir.
Maintenant que j’ai 18 ans, je peux aussi le dire : le temps passe vite …

Je remercie infiniment tout le monde pour les mails, les messages, au cours de cette période Noel-Nouvel An. Vous l’aurez compris, elle a pas été fantastique, du fait de la lassitude de ma première famille, de l’éloignement et de la différence culturelle. Mais bon, je m’accroche, et il faut bien des mauvais moments de temps en temps pour rebondir encore plus haut, nan ?

S’il vous plait, ne m’en voulez pas si je répond en retard ou pas du tout. Mais au plus je répond, au plus je me place spirituellement dans le Nord, auprès de vous, et du fait, au plus je m’éloigne de Hualien et Taiwan, ce qui est pas vraiment le but premier de l’aventure. Et il faut bien que je vous réserve quelques surprises pour mon retour, nan ?

Allez, gros bisous à tous ceux qui ont le courage de lire ce carnet de voyage occasionnel. Loin des yeux, près du coeur.

Soizic